Bercy justifie l’imposition des Français de Monaco par la convention franco monégasque du 18 mai 1963, et en particulier par l‘article 7.1.
L’interprétation littérale de cet article, comme l’a fait la Cour Administrative de Marseille dans l’affaire Boffa, est corroborée par l’éclairage de l’objet et du but de la convention qui a été donné par ceux-là même qui l’ont négociée. A ce titre, les Français nés à Monaco et y vivant sans discontinuité n’auraient jamais dû payer d’impôt. L’assujettissement n’a été possible que par la version tronquée de l’article 7 qui omettait la notion de transport.
Article 7
1. Les personnes physiques de nationalité française qui transporteront à Monaco leur domicile ou leur résidence – ou qui ne peuvent pas justifier de cinq ans de résidence habituelle à Monaco à la date du 13 octobre 1962 – seront assujetties en France à l’impôt sur le revenu des personnes physiques et à la taxe complémentaire dans les mêmes conditions que si elles avaient leur domicile ou leur résidence en France.Le législateur prévoit donc deux cas distincts :
- Soit celui des personnes qui « transporteront à Monaco leur domicile ou leur résidence« .-
- Soit celui des personnes qui ne pouvaient justifier de cinq ans de résidence au 13 Octobre 1962,
L’Esprit de la convention fiscale signée entre Monaco et la France ainsi que son texte ont fait l’objet de nombreuses réserves lors des débats parlementaires au Sénat et à l’Assemblée Nationale.
JO du 25 juillet 1963, Extrait, Page 7, paragraphe 8 (débats parlementaires concernant la convention franco-monégasque signée le 18 mai 1963).
« Il convient de souligner que le nouveau régime s’instaurera dans le respect des situations acquises. Et j’entends les situations acquises dans le sens juridique commun, c’est-à-dire qu’un avantage éventuel escompté n’est jamais une situation acquise. Ceux de nos compatriotes qui comptaient cinq ans de résidence habituelle dans la Principauté le 13 octobre 1962 continueront comme par le passé, et quelle qu’ait été leur résidence antérieure, à bénéficier de l’immunité fiscale. Il en sera de même, je réponds ainsi à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de ceux qui sont nés à Monaco ou qui y naîtront, à condition qu’ils aient toujours eu leur résidence habituelle dans la Principauté à l’époque où ils deviendraient imposables. »
Réponse de M. Maurice Schumann, président de la commission des affaires étrangères: « C’est une précision importante. »
Article 47 de l’instruction fiscale du 17 juillet 1964 (BOCD II 2686) définissant les conditions de transfert de domicile.
(« La condition de transfert de domicile à Monaco s’oppose à ce que soient considérées comme imposables en vertu du premier alinéa du paragraphe I de l’article 7 les personnes de nationalité française qui sont nées en Principauté et qui y sont établies depuis leur naissance mais ces personnes deviendraient imposables en France dans les conditions prévues par ledit article si, après avoir transféré leur domicile en France ou dans un autre pays, elles établissaient ultérieurement à nouveau à Monaco leur résidence habituelle. »
Selon Bercy, l’imposition des Français de Monaco a pour objectif principal de rétablir l’égalité des ressortissants français devant l’impôt, quel que soit leur domicile, et de prévenir l’évasion fiscale.
Pourtant, le code général des impôts stipule dans son Article 4A :
- Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l’impôt sur le revenu en raison de l’ensemble de leurs revenus.
- Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française.
Aucun Français habitant hors de France n’est imposé en France sur ses revenus perçus à l’Étranger. Il n’y a donc pas d’équité entre les Français installés en Principauté de Monaco et les autres Français de l’Étranger.
Le 1er Septembre 2009, la Cour d’Appel Administrative de Marseille a rendu un jugement N°06MA02917 sur le cas de Monsieur Sébastien Boffa, statuant sur sa seule nationalité française, (il est en effet bi-national franco-italien).et a conclu « La situation de M. X (né à Monaco en 1976), qui a toujours été domicilié à Monaco et qui n’y a jamais transféré son domicile au sens de la convention du 18 mai 1963, n’entre pas dans le champ d’application de ces dispositions ; que dans ces circonstances, ni les dispositions précitées de l’article 4 A du code général des impôts, ni aucune autre disposition de ce code ou de la convention franco-monégasque ne permettent son assujettissement à l’impôt sur le revenu en France sur ses revenus dont aucun n’est de source française ».
Le Tribunal Administratif de Nice a confirmé en 2011 dans les dossiers examinés au fil des audiences l’interprétation de l’article 7 mais a ajouté en outre la notion d’erreur de droit commise par la direction des Impôts.
Comment la France peut elle prétendre que nous sommes fiscalement domiciliés en France et que notre domicile fiscal est hors de France, (justifiant ainsi notre impossibilité à déduire les dons, les gros travaux…) ?
Comment pouvons-nous être fiscalement en France tout en étant inclus dans une circonscription de Français de l’Etranger?
Enfin notons l’engagement de la France pris par la voix de son Ministre des Affaires Etrangères en 1988, engagement que la France n’a jamais tenu
Article 7 de la convention franco-monégasque du 18 mai 1963 |
9 ème législature |
Question écrite n° 02289 de M. Paul d’Ornano (Français établis hors de France – RPR)
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M. Paul d’Ornano, considérant l’intérêt de la France de maintenir une présence française à Monaco, demande à M. le ministre d’Etat, ministre des affaires étrangères, s’il ne serait pas souhaitable que les autorités françaises modifient leur interprétation restrictive de l’article 7 de la convention franco-monégasque du 18 mai 1963 et reconnaissent le bénéfice de ces dispositions aux enfants des ayants droit. |
Réponse du ministère : Affaires étrangères
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Réponse. – La question posée par l’honorable parlementaire sur la situation fiscale des enfants français résidant à Monaco, considérant que le maintien de la présence française dans la Principauté serait favorisé par une interprétation moins restrictive, de la part des autorités françaises, de l’article 7 de la convention franco-monégasque du 18 mai 1963, appelle les observations suivantes. Le sens de l’article 7 a été précisé par l’échange de lettres du 17 avril 1978 et du 23 mai 1979, ainsi que par le procès-verbal de la réunion de la commission consultative mixte des 20 et 22 janvier 1986 ; cette disposition ainsi explicitée prive, à leur majorité, les enfants français du privilège fiscal dont bénéficient leurs parents et leur interdit en conséquence de le transmettre à leurs propres descendants. Il convient, cependant, de rappeler que l’extinction du privilège fiscal inscrite dans l’article 7 de la convention a été souhaitée par le législateur dans le souci de rétablir l’égalité devant l’impôt des Français établis de part et d’autre de la frontière franco-monégasque et de limiter l’attrait qu’exerce sur nos ressortissants le régime fiscal monégasque où l’impôt sur le revenu des personnes physiques n’existe pas. Dans ces conditions, ce n’est que si un important reflux des Français de Monaco vers l’extérieur de la Principauté devait être constaté et si un dispositif satisfaisant destiné à prévenir les abus d’une domiciliation fiscale à Monaco pouvait être mis en place que le Gouvernement pourrait être amené à reconsidérer sa position. |
Notre imposition est non seulement injuste mais la France n’a, de plus, à aucun moment tenu ses engagements.
Nous avons pu lire dans la Principauté , édition juillet-août 2009 : qu’en date du 30 et 1er juillet 2009 au sortir d’une invitation faite par le groupe d’amitié interparlementaire France Monaco au Sénat Français, les élus monégasques ont rappelé les efforts réalisés par la Principauté en matière de logement… et ont en contrepartie, insisté sur la nécessité pour la France, une fois sortie de la crise, de réaliser un effort similaire en matière de fiscalité, pour supprimer l’imposition des Français établis de longue date à Monaco, en soulignant l’injustice de la situation actuelle. Les Sénateurs français ont assuré les élus monégasques de leur soutien pour parvenir à ce résultat »
Même son de cloche lors des réunions d’amitié avec les députés français.
Ce « soutien » annoncé va-t-il un jour, enfin, aboutir à une réelle demande ? Ce vœu pieux va-t-il enfin devenir réalité ?
Et si ce sujet était VERITABLEMENT discuté lors de la prochaine réunion d’amitié de Septembre ?